Cet article exprimant
le point de vue officiel de l'Association Américaine de Diététique
est paru dans leur journal en novembre 1997. Comme l'AAD est une référence
en matière de diététique outre-Atlantique, il semble
important que sa position favorable au végétarisme soit mieux
connue en France, où une partie du milieu médical officiel
reste encore persuadée qu'en dehors de la viande il n'y a point
de salut.
Le point de vue de
l'AAD sur les bienfaits du végétarisme en matière
de santé humaine n'est d'ailleurs pas récent. L'AAD précise
que : " cette position a été adoptée par la " House
of Delegates "(1) le 18 octobre 1987, réaffirmée
le 12 septembre 1992 et le 6 septembre 1996. Elle est effective jusqu'au
31 décembre 2001 ".
Dans un langage mesuré,
typique des publications officielles, mais néanmoins très
clair quant à l'utilité des régimes végétariens,
l'AAD argumente son point de vue sur la base d'une série d'articles
scientifiques de qualité, dont la grande majorité a été
publiée dans les années 1990, et plus de la moitié
à partir de 1994. C'est dire que les informations fournies sont
tout à fait d'actualité.
Voici enfin la liste
des personnes ayant contribué à la rédaction de cet
article (2) :
Auteurs : Virginia
K. Messina, MPH, RD ; Kenneth I. Burke, PhD, RD.
Relecture :
Winston J. Craig, PhD, RD ; Johanna Dwyer, DSc, RD ; Suzanne Havala, MS,
RD, FADA ; D. Enete Larson, MS RD ; A Reed Mangels, PhD, RD, FADA ; Vegetarian
Nutrition dietetic practice group (Lenore Hodges, PhD, RD ; Cyndi Reeser,
MPH, RD).
(1)
: " Assemblée des délégués " : c'est l'instance
délibérative de l'AAD, formée de représentants
des divers domaines de la diététique ; elle se réunit
deux fois l'an pour discuter de questions professionnelles et formuler
des recommandations
(2)
: MPH : Diplômé en Santé Publique ; RD : Diététicien
diplômé d'Etat ; PhD : Docteur d'Etat ; DSc : Docteur es Sciences
; MS : Diplômé es Sciences ; FADA : Membre honoraire de l'AAD.
Les données
scientifiques suggèrent l'existence de relations de cause à
effet entre une alimentation végétarienne et un risque réduit
de plusieurs maladies et affections dégénératives
chroniques, telles que l'obésité, les maladies coronariennes,
l'hypertension, le diabète sucré, et certains types de cancers.
Les régimes végétariens, comme toutes les régimes,
doivent être élaborés d'une façon convenable
afin d'être satisfaisants sur le plan nutritionnel.
Position Officielle
: la position officielle de l'Association Américaine de Diététique
est que les régimes végétariens bien conçus
sont bons pour la santé, adéquats au plan nutritionnel, et
sont bénéfiques pour la prévention et le traitement
de certaines maladies.
Le végétarisme
et son contexte
Les végétariens
ont des modes d'alimentation très variés. Les lacto-ovo-végétariens
consomment des céréales, légumes, fruits, graines
et "noix" (le terme anglo-saxon inclut : noix, noisettes, amandes, cacahuètes),
ainsi que des produits laitiers et des oeufs, et excluent de leur alimentation
les viandes, poissons et volailles. Les végétaliens, ou végétariens
stricts, excluent, de plus, les produits laitiers, les oeufs, ainsi que
d'autres produits animaux (miel). Mais à l'intérieur de ces
cadres, d'importantes variations peuvent exister et les produits animaux
plus ou moins strictement exclus. C'est pourquoi, seule une évaluation
personnelle permet de déterminer précisément la qualité
nutritionnelle d'une alimentation végétarienne.
En dehors des bénéfices
pour la santé, les autres considérations pouvant conduire
une personne à adopter une alimentation végétarienne
sont l'intérêt pour l'environnement, l'écologie, et
la question de la faim dans le monde. Les végétariens citent
également les questions économiques, les préoccupations
éthiques, et les croyances religieuses, comme autant de raisons
pour suivre ce genre d'alimentation. La demande des consommateurs pour
des plats végétariens aux USA a conduit un nombre de plus
en plus grand de services de restauration à en proposer. Actuellement,
la plupart des services de restauration universitaires aux USA offrent
des menus végétariens.
Conséquences du
végétarisme en terme de santé
Des régimes
végétariens pauvres en graisses ou en graisses saturées
ont été utilisés avec succès dans le cadre
de programmes de santé visant à renverser le cours de maladies
coronariennes sévères. Les régimes végétariens
apportent une protection bénéfique dans ces maladies du fait
de leur faible teneur en graisses saturées, cholestérol et
protéines animales, et de leur teneur souvent élevée
en folate (qui abaissent le niveau sérique d'homocystéine),
antioxydants comme les vitamines C et E, caroténoïdes, et divers
composés phytochimiques (il s'agit des substances présentes
dans les fruits et légumes ayant des effets protecteurs pour la
santé, par exemple : les sulfures diallyles de l'ail et des oignons
renforçant le système immunitaire, les polyphénols
du thé vert neutralisant les agents carcinogènes, ou les
isoflavones du soja réduisant le niveau du cholestérol sérique).
Non seulement la mortalité par maladie coronarienne est plus faible
chez les végétariens que chez les non-végétariens,
mais les régimes végétariens ont réussi avec
succès à enrayer ce genre de maladie. Les niveaux de cholestérol
sérique total et le cholestérol LDL (fraction basse densité
du cholestérol. Un taux élevé de LDL entraîne
un risque accru d'athérosclérose) sont habituellement faibles
chez les végétariens, mais les niveaux de cholestérol
HDL (fraction haute densité du cholestérol. Un taux faible
de HDL entraîne un risque accru d'athérosclérose) et
de triglycérides varient en fonction du type d'alimentation végétarienne
suivie.
Les végétariens
sont moins sujets aux cancers des poumons et aux cancers colorectaux que
les non-végétariens. Cette réduction du risque de
cancer colorectal est associée à la consommation plus élevée
de fibres, de végétaux et de fruits. Le milieu intestinal
au niveau du colon est notablement différent chez les végétariens
de celui des non-végétariens, en des termes qui pourraient
affecter favorablement le risque de cancer. Chez les végétariens
des pays occidentaux, il n'a pas été observé des taux
moindres de cancer du sein, mais les données à l'échelle
mondiale montrent que les taux de cancer du sein sont plus faibles chez
les populations qui ont une alimentation à base de plantes. Un facteur
de protection pourrait être le faible taux d'oestrogènes rencontré
chez les femmes végétariennes.
Une alimentation végétarienne
équilibrée pourrait être utile dans la prévention
et le traitement des affections rénales. Les études sur l'humain
suggèrent que certaines protéines végétales
augmentent les taux de survie et diminueraient la protéinurie, le
taux de filtration glomérulaire, le flux sanguin rénal et
les lésions rénales, par rapport à une alimentation
non-végétarienne.
Considérations
nutritionnelles à l'usage des végétariens
Les sources végétales
de protéines peuvent, à elles seules, fournir les acides
aminés essentiels en quantité adéquate, si la variété
alimentaire est suffisante et si les besoins énergétiques
sont satisfaits. Les recherches suggèrent qu'il n'y a nul besoin
de consommer en même temps des protéines complémentaires,
mais que la consommation de sources variées d'acides aminés
au cours d'une journée devrait suffire à assurer une bonne
rétention et utilisation de l'azote chez les personnes en bonne
santé. Bien que les régimes végétariens soient
moins riches en protéines, et que les besoins individuels puissent
être plus élevés à cause d'une moins bonne qualité
de certaines protéines végétales, on constate que
l'absorption protéique est adéquate, aussi bien chez les
lacto-ovo-végétariens que chez les végétaliens.
Bien que les aliments
végétaux puissent contenir, en surface, de la vitamine B12
provenant des composants du sol, cet apport en vitamine B12 n'est pas une
source fiable pour les végétariens. Une grande partie de
la vitamine B12 que l'on trouve dans la spiruline, les algues, le tempeh
et le miso, se présente plutôt sous la forme d'un analogue
inactif que sous la forme vitaminique active. Bien que les produits laitiers
et les oeufs contiennent de la vitamine B12, les recherches suggèrent
que le taux sanguin de cette vitamine est faible chez les lacto-ovo-végétariens.
Une supplémentation ou l'usage de produits enrichis sont recommandés
pour ceux des végétariens qui excluent ou restreignent l'usage
des sous-produits animaux (oeufs et lait).
Du fait que les besoins
en vitamine B12 sont faibles, et qu'elle est à la fois stockée
et recyclée dans l'organisme, les symptômes de carence peuvent
mettre des années à apparaître. L'absorption de vitamine
B12 devenant moins efficace avec l'âge, une supplémentation
pourrait être recommandée pour tous les végétariens
âgés.
Les lacto-ovo-végétariens
bénéficient d'apports en calcium comparables ou supérieurs
à celui des non-végétariens. Les végétaliens,
toutefois, ont un apport en calcium généralement moindre
que celui des lacto-ovo-végétariens et des omnivores. Il
faut remarquer que les végétaliens pourraient avoir de plus
faibles besoins en calcium que les non-végétariens, car on
a montré que les régimes alimentaires moins protéinés
et plus alcalins ont un effet d'épargne sur le calcium. De plus,
quand une personne suit une alimentation à faible teneur protéique
et sodique et qu'elle pratique régulièrement une activité
de dépense physique comme la marche ou la course, ses besoins en
calcium peuvent être diminués par rapport à ceux d'une
personne sédentaire suivant une alimentation occidentale standard.
Ces facteurs, ainsi que les influences génétiques, pourraient
aider à comprendre les écarts de santé osseuse qui
sont indépendants des apports calciques.
Parce que les besoins
en calcium spécifiques des végétaliens n'ont pas été
établis, et qu'un apport calcique inadéquat est relié
à un risque d'ostéoporose chez les femmes en général,
les femmes végétaliennes devraient suivre les recommandations
d'apport calcique fixées selon les groupes d'âges par l'Institut
de Médecine de l'Académie Nationale des Sciences (USA, Washington).
Le calcium est bien absorbé à partir de nombreux végétaux,
et les aliments végétaux sont à même de fournir
un apport adéquat si l'alimentation comprend régulièrement
des aliments riches en calcium. De plus, beaucoup de nouveaux aliments
végétariens sont enrichis en calcium (d'origine non-animale).
Une supplémentation n'est conseillée pour les végétaliens
que s'ils ne satisfont pas à leurs besoins par leur alimentation
courante.
Aucun type d'alimentation
ne fournit des quantités importantes de vitamine D, sauf si sont
consommés des aliments enrichis en cette vitamine. Les régimes
végétaliens peuvent être déficitaires en vitamine
D, car c'est le lait de vache qui est la source alimentaire la plus commune.
Mais il existe des aliments végétaliens complémentés
en vitamine D, tels que les laits de soja et certaines céréales
pour petit-déjeuner. De plus, les recherches ont montré que
la lumière solaire est un facteur d'importance majeure pour l'équilibre
en vitamine D, et que l'apport alimentaire ne prend d'importance que dans
la mesure où l'exposition du corps au soleil n'est pas suffisante.
Une exposition au soleil pendant 5 à 15 minutes par jour des mains,
bras et visage, semble suffisante pour fournir de la vitamine D en quantité
adéquate. Les personnes à peau sombre, celles vivant à
des latitudes élevées ou des zones à forte densité
de nuages ou de brouillards, pourraient avoir besoin de s'exposer au soleil
plus longtemps. L'utilisation de crèmes anti-solaires interfère
avec la synthèse de la vitamine D. Des suppléments en vitamine
D sont recommandés pour les végétaliens en cas d'exposition
trop faible au soleil. Ceci concerne particulièrement les personnes
âgées, qui synthétisent la vitamine D moins efficacement,
et dont l'exposition au soleil est limitée.
Les études
ont montré que l'apport en zinc chez les végétariens
est plus faible ou de même niveau que celui des non-végétariens.
Mais la plupart des études montrent que les taux de zinc dans les
cheveux, le sérum ou la salive sont normaux chez les végétariens.
Des mécanismes compensatoires pourraient aider les végétariens
à s'adapter en cas d'alimentation pauvre en zinc. Toutefois, comme
le zinc provenant des végétaux est faiblement assimilé,
et que les conséquences des déficiences en zinc sont mal
comprises, les végétariens devraient s'efforcer de suivre
ou dépasser les Apports Journaliers Recommandés.
Les régimes
alimentaires excluant les poissons ou les oeufs manquent d'acide docosahéxanoïque
(DHA), un acide gras à longue chaîne de la série oméga-3.
Les végétariens peuvent avoir un taux sanguin faible en cet
acide gras, bien que toutes les études ne soient pas d'accord entre
elles à ce sujet. L'acide alpha-linolénique, qui est un acide
gras essentiel, peut être transformé en DHA, bien que le processus
de transformation apparaisse peu efficace, et que des apports élevés
en acide alpha-linolénique interfèrent avec ce processus.
Les conséquences d'un faible niveau de DHA ne sont pas claires.
On recommande néanmoins aux végétariens d'inclure
dans leur alimentation de bonnes sources d'acide alpha-linolénique.
Le végétarisme
au cours des âges de la vie
Les régimes
végétaliens ou lacto-ovo-végétariens bien conçus
sont appropriés à tous les âges de la vie, y compris
durant la grossesse et la lactation. Ces régimes alimentaires bien
planifiés satisfont aux besoins nutritionnels des nourrissons, des
enfants, des adolescents, et favorisent une croissance normale. Les carences
ont toutes les chances de n'être observées que dans des populations
suivant des régimes très restrictifs (macrobiotique végétalien
ou frugivore, par exemple). Tous les enfants végétaliens
devraient bénéficier de sources fiables de vitamine B12 et,
si l'accès au soleil est limité, de suppléments en
vitamine D ou d'aliments enrichis. Les aliments riches en calcium, fer
et zinc devraient être privilégiés. Des repas et des
en-cas fréquents, ainsi que l'emploi de certains aliments raffinés
ou riches en matière grasse peuvent aider les enfants végétariens
à satisfaire leurs besoins en énergie. Les recommandations
pour les supplémentations en fer ou vitamine D et pour l'introduction
des aliments solides sont les mêmes pour les nourrissons végétariens
ou non-végétariens. Quand arrive le moment d'introduire des
aliments riches en protéines, les nourrissons végétariens
peuvent prendre de la purée de tofu, du fromage blanc, et des légumineuses
réduites en purée. Les nourrissons végétaliens
nourris au sein devraient recevoir un apport en vitamine B12 si l'alimentation
de la mère n'est pas supplémentée, et en vitamine
D si l'exposition au soleil est insuffisante.
Les régimes
végétariens peuvent également répondre aux
besoins des athlètes de compétition. La demande en protéines
peut être élevée, parce que l'entraînement accroît
le métabolisme des acides aminés, mais une alimentation végétarienne
conforme aux besoins énergétiques et incluant de bonnes sources
protéiques (par exemple : produits à base de soja et légumineuses),
est capable de fournir les protéines requises sans avoir recours
à des aliments spéciaux ou des suppléments. Chez les
adolescents pratiquant l'athlétisme, l'attention doit particulièrement
porter sur la satisfaction des besoins en énergie, en protéines
et en fer. L'aménorrhée peut se rencontrer davantage chez
les athlètes végétariennes que non-végétariennes,
mais toutes les études ne sont pas d'accord à ce sujet. Maintenir
un cycle menstruel normal pourrait nécessiter d'augmenter l'apport
en énergie et matières grasses, et de réduire l'apport
en fibres, ainsi que les entraînements trop rigoureux.
Les régimes
lacto-ovo-végétariens et végétaliens peuvent
satisfaire aux demandes en nutriments et énergie des femmes enceintes.
Le poids à la naissance des enfants nés de femmes végétariennes
convenablement nourries est normal et similaire à celui des enfants
nés de femmes non-végétariennes. L'alimentation des
femmes végétaliennes enceintes et allaitantes devrait être
supplémentée respectivement par 2,0µg et 2,6µg
de vitamine B12 par jour, et par 10µg de vitamine D par jour en cas
d'exposition au soleil restreinte. Des suppléments de folate (vitamine
B9) sont conseillés pour toutes les femmes enceintes, bien que les
végétariennes aient typiquement des apports plus élevés
que ceux des non-végétariennes.
Organisation des repas
végétariens
Les règles
suivantes peuvent être une aide pour composer des repas bons pour
la santé :
* Produits laitiers
: inférieur à 3 portions / jour. Exemples de portions : 1
portion = 240 ml de lait, 1 portion = 240 ml de yaourt, 1 portion = 45g
de fromage
* Légumineuses,
noix, graines, oeufs : 2 à 3 portions / jour. Exemples de portions
: 1 portion = 120 ml de légumineuses cuites, 1 portion = 1 oeuf,
1 portion = 30 ml de noix et graines, 1 portion = 240 ml de lait de soja,
1 portion = 60 ml de tofu ou tempeh, 1 portion = 30 ml de beurre de cacahuète
* Fruits : 2 à
4 portions / jour. Exemples de portions : 1 portion = 180 ml de jus de
fruits, 1 portion = 60 ml de fruits séchés, 1 portion = 120
ml de salade de fruits frais, 1 portion = 120 ml de fruits en conserve,
1 portion = 1 fruit entier de taille moyenne (banane, pomme, orange)
* Légumes :
3 à 5 portions / jour. Exemples de portions : 1 portion = 120 ml
de légumes cuits ou râpés crus, 1 portion = 240 ml
de légumes à feuilles, divers, crus
* Pain, céréales,
pâtes : 6 à 11 portions / jour. Exemples de portions : 1 portion
= 30 g de céréales de petit-déjeuner, prêtes
à consommer, 1 portion = 1 tranche de pain, 1 portion = 120 ml de
céréales cuites divers, 1 portion = 120 ml de pâtes
cuites
Exemples de calcul
à
partir des portions :
légumes = 3
à 5 x (120 ml de légumes cuits ou râpés crus)
= 360 à 600 ml de légumes cuits ou râpés crus.
Ou légumes
= 2 à 3 x (120 ml de légumes cuits ou râpés
crus) + 1 à 2 x (240 ml de légumes à feuilles, divers,
crus) = 240 à 360 ml de légumes cuits ou râpés
crus + 240 à 480 ml de légumes à feuilles, divers,
crus.
Adresse internet de l'Alliance Végétarienne française
: http://www.ivu.org/avf/
Présentation
du document par l'Alliance Végétarienne française
Texte
de la déclaration (traduit par l'Alliance Végétarienne
française)
Le végétarisme
et le végétalisme :